Science

« Il est criminel de penser que la vie pourrait être exportée ailleurs »

Jean-Pierre Bibring est l’un des plus grands spécialistes mondiaux du système solaire. Il se souvient, au micro de Zoé Varier, des étapes décisives de l’exploration spatiale depuis les années 1950. Selon lui, en moins de 80 ans, cette aventure a bouleversé les représentations que nous avions de la Terre … et de la vie!

L’astrophysicien Jean-Pierre Bibring est l’un des coordinateurs du projet Rosetta / Philae qui a vu une sonde atterrir à la surface d’une comète à 500 millions de km de la Terre © AFP / Leemage

Jean-Pierre Bibring est l’un des grands spécialistes de l’exploration du système solaire, professeur de physique à l’Université Paris-Sud et astrophysicien à l’Institut d’Astrophysique Spatiale d’Orsay. Il a choisi comme « journée spéciale » le 12 novembre 2014, journée au cours de laquelle, après 10 ans de vol, à plus de 500 millions de kilomètres de la Terre, l’enquête Rosetta a laissé tomber le robot Philae sur la comète Tchouri. Et pour une bonne raison, Jean-Pierre Bibring est l’un des coordinateurs scientifiques de cette mission spatiale.

Ce 12 novembre 2014, il est à Centre européen des opérations spatiales du’Agence spatiale européenne, à Darmstadt, Allemagne. Pour lui et des dizaines d’autres scientifiques, l’atterrissage de Philae sur la comète 67P / Tchourioumov-Guérassimenko (surnommée « Tchouri ») représente l’aboutissement de décennies de travail. le sonde _Rosettaavait en fait quitté la Terre dix ans plus tôt, à bord la fusée Ariane V_.

Ce rêve est né près de trente ans plus tôt. Il y a trente ans, alors que l’exploration spatiale en était vraiment à ses balbutiements, un certain nombre de personnes se disaient: «Ce qu’il faut maintenant, c’est aller voir une comète et atterrir dessus pour l’analyser». […] C’était un défi et une ambition scientifique folle.

De la joie à la consternation

Autant dire que, ce 12 novembre 2014, pendant les six heures de chute libre subies par l’atterrisseur Philae avant d’atterrir sur la comète, six heures de stress et de tension. A 17 heures, il y a eu une explosion de joie dans la salle de contrôle de Darmstadt: le robot avait atterri à seulement 100 mètres du site d’atterrissage prévu. Cette explosion de joie, cependant, suit immédiatement une douche froide.

Immédiatement, il a fallu faire un panorama. Je suis allé directement chercher les images. Et là, c’est une folle consternation: ces images sont floues. L’objet avait rebondi, nous étions partis de la comète.

Image prise par Philae peu après la séparation de l'Orbiter Rosetta
Image prise par Philae peu après la séparation de l’orbiteur Rosetta © Maxppp / ESA / Rosetta

Ce n’est que le lendemain matin, après une nuit de totale incertitude, que Jean-Pierre Bibring et ses associés auront la confirmation que Philae avait néanmoins bien atterri sur Tchouri après deux rebonds à la surface de la comète et que le robot allait pouvoir effectuer les mesures pour lesquelles il avait été envoyé.

Au petit matin, nous avons eu cette image absolument magique. Nous avions réussi à atterrir, nous étions immobiles et nous pouvions enfin commencer à analyser le plus vieil objet du système solaire que nous n’avions jamais analysé. […] Nous avons passé trois jours et nuits absolument extraordinaires et merveilleux.

La pluralité des mondes

Pour Jean-Pierre Bibring, depuis fin des années 1950, l’exploration spatiale a changé notre vision de la Terre. Alors que l’ère spatiale commence, la vision commune de l’Univers est celle de  » Pluralité de mondes », Développé par Giordano Bruno et selon lequel l’univers étant infini, il y aurait une infinité d’étoiles et donc une infinité de planètes semblables à la Terre. Au début de l’ère spatiale, on pense donc qu’il peut y avoir de la vie partout dans l’univers.

Lorsque l’ère spatiale est née, le dogme dominant était la pluralité des mondes.

C’est cette idée que la connaissance du système solaire remet en question depuis soixante ans. Selon Jean-Pierre Bibring, puisque les résultats des sondes américaines Viking dans les années 1970, tout semble montrer que la Terre est unique en son genre et qu’ainsi, la vie n’est pas une propriété générique de l’univers.

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Le concept de «vivre» est-il toujours opérationnel?

Pour l’astrophysicien, l’unicité de la Terre, en tant qu’objet planétaire, est relativement acquise. Pour le vivant qu’elle porte, en revanche, c’est une vraie question, nourrie par les résultats obtenus par Philae à la surface de la comète Tchouri. Jean-Pierre Bibring pousse le curseur encore plus loin et questionne le concept même de vie et de vivre.

Peut-être que le vivant lui-même est une construction d’une chimie particulière intimement liée à la construction de la planète Terre.

Ne pourrions-nous donc jamais trouver d’autres formes de vie ailleurs dans l’univers? La réponse Jean-Pierre Bibring est définitive. Nous pourrions trouver d’autres formes d’évolution de la matière carbonée ailleurs, mais rien ne peut suggérer que nous puissions l’appeler vivante.

Pour moi, il n’y a qu’une seule forme de vie. Il n’y a pas de principe de vie qui puisse prendre d’autres formes ailleurs.

Pour de plus amples

(re) regarder le documentaire Et si la Terre était unique? par Laurent Lichtenstein, diffusé sur France 5 dans le  » Grand format scientifique »(Disponible jusqu’au 23 novembre 2020)

Le programme musical du jour

  • Frédéric Chopin (compositeur) – Maurizio Pollini (piano), « Étude de piano n ° 23 en la min op 25 n ° 11« , 1972
  • Juliette Gréco, « Horoscope« , 1967
  • James Blake, « Êtes-vous même réel?« , 2020

Le générique du spectacle

Isabelle Pierre, « Il fait beau« (1971), remixé par Degiheugi, 2012

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Rolande Desroches

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